Covid-19 – Les mesures sociales du 3ème projet de loi de finances rectificative pour 2020 : la mesure tant attendue d’exonération des charges sociales se précise.
Déposé le 10 juin 2020 à l’Assemblée nationale, le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 sera examiné par les députés à partir du 29 juin. Son objectif principal : faire face aux conséquences de l’épidémie de Covid-19 en allégeant les charges pesant sur la trésorerie des entreprises. Sur le plan social, cela se traduirait par la mise en place de plusieurs dispositifs d’aide en matière de cotisations et contributions sociales à destination des employeurs et des indépendants. Selon l’exposé des motifs, ces dispositifs concerneraient les entreprises ayant massivement recours aux demandes de reports d’échéances de cotisations sociales mises en place depuis le 15 mars 2020.
TPE et PME : un dispositif exceptionnel et temporaire d’exonération de cotisations patronales
Le projet de loi propose d’accorder à certaines entreprises des secteurs les plus touchés par la crise économique causée par la pandémie du Covid-19 une mesure exceptionnelle et temporaire d’exonération totale de certaines cotisations et contributions sociales patronales.
Un décret devrait ensuite préciser les conditions de mise en œuvre de ce dispositif et notamment fixer plus précisément la liste des secteurs d’activité concernés.
Qui pourrait bénéficier de ce dispositif ?
Deux grandes catégories d’employeurs pourraient bénéficier de ce dispositif d’exonération de cotisations au titre des rémunérations versées à leurs salariés :
- les entreprises de moins de 250 salariés (les PME) des secteurs d’activité les plus impactés ;
- les entreprises de moins de 10 salariés (les TPE) à certaines conditions.
• Les PME dans les secteurs d’activité les plus touchés
Le dispositif exceptionnel d’exonération de cotisations sociales patronales s’appliquerait d’abord aux cotisations dues sur les rémunérations des salariés employés par des entreprises de moins de 250 salariés exerçant leur activité principale :
- dans les secteurs suivants : tourisme, hôtellerie, restauration, sport, culture, transport aérien, événementiel ayant été « particulièrement affectés par les conséquences économiques et financières de la propagation de l’épidémie de Covid-19 au regard de la réduction de leur activité en raison notamment de leur dépendance à l’accueil du public » ;
- ou dans les secteurs dont l’activité dépend de celle des secteurs précédents et qui ont subi une très forte baisse de leur chiffre d’affaires.
À noter : Un communiqué de presse du Gouvernement en date du 10 juin dernier indique que pour bénéficier de ces mesures, les entreprises devraient avoir subi 80 % de perte de chiffre d’affaires durant la période de confinement (15 mars-15 mai 2020). Cette précision doit néanmoins être confirmée par décret. Par ailleurs, ce même communiqué donne deux listes détaillées des secteurs d’activité visés qui seraient les mêmes que les secteurs concernés par une prise en charge de l’activité partielle au taux de 70 % :
- la première de 45 secteurs d’activité correspondant aux secteurs directement impactés (hôtels et hébergements similaires, gestion d’installations sportives, production de films et de programmes pour la télévision, gestion des musées…) ;
- la seconde de 42 secteurs dépendant des premiers, et ayant subi une perte importante de chiffre d’affaires (culture de la vigne, pêche, commerce de gros fruits et légumes, commerce de gros textile, stations-service, distributions de films cinématographiques…).
À ce stade, ces deux listes n’ont qu’une valeur indicative et doivent être avalisées par voie réglementaire.
• Les TPE accueillant du public
L’exonération exceptionnelle de cotisations sociales patronales serait également ouverte au titre des rémunérations versées par les employeurs de moins de 10 salariés dont l’activité principale implique l’accueil du public et dont l’activité a été interrompue du fait de la propagation de l’épidémie de Covid-19.
Seraient concernés les secteurs pour lesquels l’accueil du public a été interrompu jusqu’au 11 mai 2020 du fait des mesures sanitaires prises pendant le confinement. Seraient exclues du champ de l’exonération les TPE ayant procédé à des fermetures volontaires.
• Les TPE relevant du régime général ou agricole, pour leurs salariés ouvrant droit à la réduction générale
Seraient concernés les employeurs relevant du régime général et du régime agricole. En effet, l’exonération aurait vocation à s’appliquer aux cotisations et contributions sociales dues au titre des revenus d’activité. Les salariés permettant l’octroi de cette exonération seraient ceux pour lesquels l’employeur est obligatoirement soumis au régime Unédic d’assurance chômage, et les salariés ouvrant droit à l’assurance chômage des employeurs du secteur public ou parapublic.
À noter : Contrairement à la réduction générale de cotisations patronales, le nouveau dispositif d’exonération jouerait quel que soit le montant de la rémunération des salariés, aucune limite n’étant prévue à ce stade dans le projet de loi.
À quelles conditions ?
L’employeur ne pourrait pas bénéficier de ce dispositif exceptionnel si au cours des 5 années précédentes, il a été condamné au titre d’infractions pour travail dissimulé, à savoir :
– pour travail totalement ou partiellement dissimulé ;
– pour publicité tendant à favoriser, en connaissance de cause, le travail dissimulé ;
– pour recours, sciemment, directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé ;
– pour travail dissimulé par dissimulation d’activité (travail totalement ou partiellement dissimulé) ;
– pour travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié.
À noter : Signalons que l’absence de condamnation serait également une condition d’ouverture du droit à l’aide au paiement des cotisations et contributions sociales, et à l’exonération de cotisations et contributions au bénéfice des travailleurs indépendants.
Quelles seraient les cotisations exonérées ?
Les employeurs éligibles bénéficieraient d’une exonération totale des cotisations et contributions sociales entrant dans le champ de la réduction générale de cotisations patronales, à l’exception des cotisations de retraite complémentaire légalement obligatoires.
Autrement dit, les employeurs seraient totalement exonérés :
– des cotisations d’allocations familiales ;
– des cotisations maladie, maternité, invalidité et décès ;
– de la cotisation vieillesse plafonnée ;
– de la cotisation vieillesse déplafonnée ;
– de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles dans la limite de 0,69 % ;
– de la contribution de solidarité pour l’autonomie ;
– de la contribution au fonds national d’aide au logement ;
– des contributions d’assurance chômage.
Sur quelle période ce dispositif serait-il applicable ?
Deux durées d’application seraient prévues en fonction des deux catégories d’employeurs visés.
Ainsi, l’exonération serait applicable aux cotisations et contributions sociales dues sur les rémunérations des salariés au titre de la période comprise entre :
– le 1er février et le 31 mai 2020 pour les PME de moins de 250 salariés ;
– le 1er février et le 30 avril 2020, soit un mois de moins, pour les TPE.
Cette exonération totale porterait sur les cotisations patronales acquittées ou reportées durant les mois de mars à juin 2020 (au titre des périodes d’emploi de février à mai) ou de mars à mai 2020 (au titre des périodes d’emploi de février à avril), selon les situations.
Les employeurs pourraient régulariser leurs déclarations sociales antérieures
Pour bénéficier de ce dispositif, les employeurs pourraient, jusqu’au 31 octobre 2020, régulariser leurs déclarations sociales. Aucune pénalité ne leur serait applicable.
À noter : La possibilité pour les employeurs de régulariser leurs déclarations sociales jusqu’au 31 octobre 2020 serait également ouverte pour bénéficier de l’aide au paiement des cotisations et contributions sociales ci-dessous.
Comment ce mécanisme s’articulerait-il avec d’autres dispositifs d’exonération ?
Ce dispositif d’exonération exceptionnel serait cumulable avec la réduction générale de cotisations patronales ainsi qu’avec toute autre exonération totale ou partielle de cotisations sociales et avec l’application de taux spécifiques, d’assiettes et de montants forfaitaires de cotisations. En pratique, l’exonération de cotisations exceptionnelle serait appliquée sur les cotisations et contributions restant dues après application des mécanismes d’exonération de droit commun.
L’exonération exceptionnelle s’accompagnerait d’une aide exceptionnelle
Les employeurs éligibles à la mesure d’exonération exceptionnelle exposée ci-dessus bénéficieraient également d’une aide au paiement de leurs cotisations et contributions sociales. Le montant de cette aide serait égal à 20 % des revenus d’activité pris en compte pour le calcul des cotisations de sécurité sociale (du régime général ou du régime agricole) au titre des périodes ouvrant droit à l’exonération exceptionnelle. Il serait calculé par l’entreprise.
Le montant de l’aide serait imputable sur l’ensemble des sommes dues aux Urssaf, CGSS en Outre-mer et caisses de mutualité sociale agricole au titre de l’année 2020, après application de l’exonération exceptionnelle et de toute autre exonération totale ou partielle applicable.
Ainsi, l’aide permettrait, soit le paiement des dettes de cotisations et contributions qui demeureraient après application des exonérations soit, en l’absence de dette, la réduction des cotisations et contributions de la période courant immédiatement après la reprise d’activité.
Les employeurs pourraient, jusqu’au 31 octobre 2020, régulariser leurs déclarations sociales antérieures afin de bénéficier de cette aide.
Les PME non aidées pourraient solliciter une remise partielle
Les employeurs de moins de 50 salariés pourraient solliciter une remise partielle des dettes de cotisations et contributions patronales constituées au titre des périodes d’activité du 1er février au 31 mai 2020. Cette remise, qui ne pourrait excéder 50 % des sommes dues, pourrait être accordée aux employeurs réunissant les conditions suivantes :
- avoir moins de 50 salariés au 1er janvier 2020 ;
- ne pas bénéficier des dispositifs exceptionnels d’exonération et d’aide au paiement exposés ci-dessus ;
- avoir subi, sur la période courant du 1er février au 31 mai 2020, une réduction d’activité d’au moins 50 % par rapport à la même période de 2019 ;
- conclure un plan d’apurement dans les conditions prévues ci-dessous : le bénéfice de la remise partielle serait accordé sous réserve du remboursement de la totalité des cotisations et contributions incluses dans le plan ;
- être à jour de ses obligations déclaratives ou de paiement pour les périodes d’emploi antérieures au 1er janvier 2020.
Selon l’étude d’impact du projet de loi, une grille d’analyse des situations permettrait aux organismes de décider, d’accorder ou de refuser les demandes de remise. La graduation de la remise de cotisations patronales serait ainsi proportionnée à l’importance de la baisse de chiffre d’affaires. Elle pourrait être par exemple de 50 % pour les cotisants dont la perte de chiffre d’affaires est d’au moins 70 % et de 30 % pour les cotisants dont la perte de chiffre d’affaires est supérieure à 50 % mais inférieure à 70 %.
Tous les cotisants pourraient solliciter un plan d’apurement sans majoration ni pénalité
Les employeurs ou les travailleurs indépendants pour lesquels des cotisations et contributions sociales resteraient dues à la date du 30 juin 2020 pourraient bénéficier de plans d’apurement spécifiques s’accompagnant d’une remise automatique des majorations et pénalités de retard.
Pour les grandes entreprises, le bénéfice de ces plans spécifiques d’apurement serait subordonné à l’absence, entre le 5 avril et le 31 décembre 2020, de décision de versement de dividendes ou de rachat d’actions. En cas de non-respect de cette condition, les majorations et pénalités resteraient dues sur les impayés de la période courant du 12 mars au 30 juin 2020 mais les organismes pourraient, accorder, sur demande, si la situation le justifie, dans le cadre du droit commun, une remise, totale ou partielle, de ces majorations de retard.
Les entreprises de moins de 250 salariés recevraient une proposition
Les directeurs des organismes de recouvrement pourraient adresser avant le 30 novembre 2020 des propositions de plan d’apurement aux entreprises de moins de 250 salariés. À défaut d’opposition ou de demande d’aménagement par le cotisant dans un délai d’un mois, le plan serait réputé accepté.
Ainsi, pour les entreprises de moins de 250 salariés, les plans seraient proposés par les organismes de recouvrement eux-mêmes, sans démarche de l’employeur.
En revanche, pour les autres employeurs et pour les travailleurs indépendants, le bénéfice d’un plan d’apurement serait subordonné au dépôt, avant la même date, d’une demande auprès du directeur de l’organisme de recouvrement.
Quelles cotisations pourraient faire l’objet d’un plan d’apurement ?
- pour les travailleurs indépendants : l’ensemble des cotisations et contributions ouvrant droit à la réduction exceptionnelle de cotisations exposée ci-dessous;
- pour les employeurs : les cotisations et contributions patronales dans le champ de l’exonération exceptionnelle de cotisations ainsi que les cotisations salariales qui auraient été précomptées sans être reversées. Le plan devrait alors prévoir en priorité le remboursement des cotisations salariales. Le cas échéant, les plans tiendraient compte des exonérations et remises exceptionnelles accordées.
Quelle serait la durée des plans ?
Selon l’étude d’impact du projet de loi, la durée maximale des plans serait laissée à l’appréciation des organismes Elle serait proportionnée au niveau de dette et à la capacité de remboursement des employeurs sans pouvoir excéder 36 mois. Les organismes de recouvrement pourraient proposer des échéances progressives afin de ne pas obliger au remboursement immédiat d’échéances trop élevées en plus des cotisations courantes.
À noter : Le plan d’apurement serait cumulable avec les autres dispositifs créés par la loi.
Tableau récapitulatif des aides aux employeurs
Une réduction de cotisations sociales pour les travailleurs indépendants en difficulté
L’article 18 du projet de loi envisage de mettre en place une réduction exceptionnelle des cotisations sociales pour les travailleurs indépendants les plus touchés par la crise économique.
Ce dispositif d’aide suivrait des modalités différentes selon que le travailleur indépendant relève ou non du régime micro-social, ou acquitte ou non ses cotisations provisionnelles sur une estimation de son revenu de l’année en cours.
Les travailleurs indépendants auraient également la possibilité de conclure avec l’Urssaf un plan d’apurement de leurs cotisations et contributions sociales comme indiqué ci-dessus.
À noter : Le bénéfice de cette réduction serait subordonné à la condition que le travailleur indépendant n’ait pas été condamné au cours des 5 années précédentes pour une des infractions de travail dissimulé exposées plus haut.
Une exonération de cotisations sociales modulée par secteurs d’activité
La mesure d’aide prévue pour les travailleurs indépendants ne relevant pas du régime micro-social et pour les non-salariés agricoles (chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole) prendrait la forme d’une réduction de leurs cotisations et contributions sociales dues au titre de l’année 2020. Elle s’appliquerait dans la limite des montants dus aux Urssaf ou aux caisses de la MSA et serait réservée à ceux qui exercent leur activité principale :
- soit dans les conditions fixées pour les entreprises de moins de 250 salariés pour le bénéfice de l’exonération exceptionnelle de cotisations sociales ;
- soit dans les secteurs concernant spécifiquement les TPE pour le droit à cette exonération .
À noter : Ne seraient ainsi pas concernées par cette mesure les cotisations d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d’invalidité décès dues par les professionnels libéraux relevant de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professionnels libéraux (Cnav-PL) et par les avocats.
Ne seraient pas non plus visées les cotisations dues par les travailleurs indépendants au titre de la régularisation de leurs cotisations et contributions provisionnelles dues au titre de l’année 2019.
Un décret fixerait, par secteur d’activité, le montant de la réduction des cotisations sociales. Selon l’exposé des motifs, ce décret devrait fixer un montant forfaitaire d’exonération.
Un abattement d’assiette pour les cotisations calculées sur le revenu estimé de l’année en cours
La réduction de cotisations sociales visée ci-dessus pourrait prendre la forme d’un abattement sur le revenu d’activité du travailleur indépendant lorsque celui-ci acquitte ses cotisations provisionnelles sur la base d’une estimation de son revenu pour l’année en cours. Le montant de l’abattement serait fixé par décret. Les majorations de retard dues en cas d’insuffisance des acomptes provisionnels ne seraient pas applicables aux revenus de l’année 2020.
Un dispositif adapté pour les travailleurs indépendants relevant du régime micro-social
Les micro-entrepreneurs relevant du régime micro-social seraient exonérés de cotisations de sécurité sociale sur leur chiffre d’affaires ou leurs recettes correspondant aux échéances de :
- mars à juin 2020 pour ceux dont l’activité relève des secteurs ouvrant droit à l’exonération exceptionnelle de cotisations sociales des entreprises de moins de 250 salariés ;
- mars à mai 2020 pour ceux dont l’activité relève des secteurs ouvrant droit à cette exonération pour les TPE.
Plus précisément, ils pourraient déduire le chiffre d’affaires ou les recettes correspondant à ces échéances de ceux déclarés au titre de l’année 2020.
Une réduction exceptionnelle de cotisations sociales pour les artistes-auteurs
Les artistes-auteurs relevant du régime général de la sécurité sociale bénéficieraient d’une réduction de leurs cotisations et contributions sociales dues pour l’année 2020.
Le montant de cette réduction serait fixé par décret et serait forfaitaire selon l’exposé des motifs. Il serait différent selon que le revenu artistique de 2020 est :
- inférieur à 1 200 fois le Smic horaire, soit à 12 180 € ;
- compris entre 1 200 et 2 400 fois le Smic horaire, soit entre 12 180 € et 24 360 € ;
- égal ou supérieur à 2 400 fois le Smic horaire, soit à 24 360 €.
Cette mesure se traduirait :
- pour les artistes-auteurs non soumis au précompte de leurs cotisations sociales, par la réduction de leurs acomptes provisionnels de cotisations pour 2020. La régularisation définitive de ces acomptes tiendrait lieu de réduction ;
- pour ceux soumis au précompte de leurs cotisations, par un versement, de la part de l’Urssaf du Limousin, du montant de cette réduction dans la limite des cotisations dont ils sont redevables pour 2020.
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