Les licenciements abusifs : le barème d’indemnités jugé une fois de plus contraire aux normes internationales
Le 9 avril dernier, le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux a jugé le barème d’indemnités contraire à la convention 158 de l’OIT et à l’article 24 de la charte sociale européenne (n° RG F 18/00659). Jugé insatisfaisant, le plafond de ce barème ne permettait pas de dissuader l’employeur de procéder au licenciement injustifié de la salariée, ni d’en réparer le préjudice. Après Troyes, Lyon, Amiens, Grenoble, Agen et Paris, le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux vient lui aussi d’écarter le barème d’indemnités pour « licenciement sans cause réelle et sérieuse » prévu à l’article L 1235-3 du Code du travail issu des ordonnances Macron.
Un barème remis en cause
Dans cette affaire, le juge s’est prononcé sur l’application de l’article 24 de la charte sociale européenne en requalifiant la relation contractuelle entre la plaignante ayant le statut d’auto-entrepreneur et une agence d’architecture, liées par un contrat de travail. Le juge a analysé la rupture de celui-ci et a pris acte de divers manquements à l’encontre de l’employeur, ayant pour résultat un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Selon le barème appliqué et tenant compte de son ancienneté légèrement inférieure à un an, le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux a constaté que la collaboratrice n’avait droit qu’à une indemnisation maximale de 985,85 € (soit un demi mois de salaire). Il a ainsi considéré que « ce montant était insuffisant pour réparer intégralement le préjudice subi » par la plaignante, cette dernière ne pouvant bénéficier ni des allocations chômage au terme de son contrat de travail, ni des indemnités de rupture (mettant l’intéressée dans une situation difficile car divorcée avec deux enfants à charge). De plus, s’ajoutait à ce dommage le fait que la salariée ait été contrainte d’adopter le statut d’auto-entrepreneur, laissant le paiement de l’ensemble des cotisations sociales à sa charge : un préjudice moral qu’il convenait de réparer.
Le jugement rendu
La question de la légitimité de ce plafond défini par l’article L 1235-3 du Code du travail s’est donc posée, manifestement insusceptible de réparer l’intégralité du dit préjudice. Il revenait donc au juge d’apprécier la conformité de l’application de cette règle par rapport aux conventions internationales. Puisque les plafonds d’indemnisation issus de l’ordonnance n° 2017-13 87 du 22 septembre 2017 ne pouvaient dissuader l’employeur de procéder à un licenciement injustifié, et que le juge ne pouvait fixer une indemnisation sur la seule référence à l’ancienneté de service, le Conseil a ainsi fixé à hauteur de 12 000 € le montant des dommages et intérêts accordés en conséquence du licenciement abusif, soit l’équivalent de 6 mois de salaire.
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